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ne serait-il pas déplorable de s’exposer à ne pas le rencontrer ailleurs, et à courir la chance de compromettre, dans une construction neuve, des collections dont rien aujourd’hui ne peut menacer la sécurité ?

On pense du moins que le prix de vente des terrains occupés par les bâtiments de la Bibliothèque couvrirait une portion considérable de la dépense nécessaire pour l’achèvement du Louvre. Si la France tient à terminer le Louvre, nous admettrions avec peine qu’elle ne puisse y parvenir sans spéculer sur l’aliénation d’un monument, et sans mettre à l’enchère un sol que les arts ont consacré par des chefs-d’œuvre. C’est à coup sûr s’appauvrir que de renverser un édifice ancien, d’une valeur positive et bien reconnue, pour en élever un nouveau, d’une utilité contestable et d’un mérite tout à fait problématique. Assez de ruines ont été faites autour de nous, au milieu même de Paris. Mais, indépendamment de ces considérations, étrangères aux combinaisons financières, nous avons tout lieu de penser que les terrains de la Bibliothèque sont loin d’avoir la valeur qu’on leur attribue, et qui aurait été portée à un chiffre dont l’exagération est prouvée par les variations mêmes qu’il a subies. Il faudrait d’ailleurs déduire du prix de la vente le montant de la perte immense qui résulterait pour l’État de la destruction inévitable de la plus grande partie du matériel, des boiseries, des tablettes, des armoires, de toute la menuiserie, en un mot, qui ne pourrait facilement s’adapter à un bâtiment nouveau, et de plus, la valeur des constructions commencées sur la rue Vivienne. Ces constructions, qu’il faudrait nécessairement abandonner, et dont les frais de démolition seraient à peine couverts par la vente des matériaux, ont coûté au Trésor environ 1,400,000 francs. Infiniment regrettable au point de vue de l’art, l’opération serait donc, en même temps, d’un avantage plus que douteux sous le rapport financier.

Enfin, Monsieur le Ministre, nous vous ferons observer, à vous qui êtes le protecteur naturel de nos établissements scientifiques et littéraires, que la Bibliothèque nationale, placée de la manière la plus convenable dans le local qu’elle occupe, se trouverait au Louvre dans des conditions très-peu favorables au service. La disposition des longues galeries dont se composerait la nouvelle partie du Louvre ne se prête ni à l’organisation d’une surveillance centrale s’exerçant sur toutes les parties de l’établissement, ni à