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leurs joints ouverts, leurs parements dégradés. On commença, dès lors, à proscrire les gargouilles et à les remplacer dans quelques monuments par des conduites verticales en plomb, qui, passant à travers les corniches, serpentant le long des contre-forts, durent rejeter les eaux pluviales en dehors des édifices, au niveau même du sol. Heureusement beaucoup de nos églises trop pauvres, ou mieux entretenues, ou construites en matériaux résistant bien à l’eau, n’ont point reçu cette nouvelle disposition.

L’usage, de nos jours, est de placer le long des murs de nos constructions des tuyaux verticaux en fonte pour conduire les eaux pluviales ; on a voulu appliquer ce système aux édifices anciens. Or, ainsi que nous l’avons dit, ce système ne saurait s’appliquer à des édifices dans lesquels l’écoulement des eaux est soumis à un principe franchement accusé ; en outre, il présenterait plus de dangers que d’avantages.

En effet, pour poser aujourd’hui des conduites verticales en fonte sur ces édifices anciens, il faudrait changer tout le système des pentes des chéneaux ; autrement chaque gargouille devrait être remplacée par une conduite, et, dès lors, les monuments en seraient couverts : il faudrait percer des corniches, entailler les bandeaux, les ressauts, et empattements de l’architecture, ou bien faire dévier les tuyaux, ce qui causerait des fuites ou des engorgements ; il faudrait faire de nombreux scellements de colliers dans les murs et les contre-forts, accrocher des cuvettes en métal à de la pierre.

En changeant ainsi l’aspect d’un édifice, on n’améliorerait même pas sa situation sous le rapport de sa conservation : car les conduites s’engorgent nécessairement pendant les temps de dégel, et font alors couler les eaux en dehors des tuyaux, le long des murs ; elles se brisent fréquemment lorsqu’une nouvelle gelée suit un dégel incomplet ; elles forment, malgré la peinture dont on les couvre, un oxyde de fer qui corrode la pierre ; leurs scellements la font éclater ; elles occasionnent, par des fuites presque inévitables, une humidité permanente le long des murs et dans les angles où elles sont posées ; elles sont d’un entretien difficile, et, enfin, les accidents fréquents auxquels elles sont sujettes sont bien plus funestes à la conservation des monuments que ne saurait l’être l’eau pure jetée par les gueulards, fouettée par le vent sur les parements, et presque aussitôt séchée par l’air. L’expérience l’a dé-