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mans restés intacts, on reconnaissait l’inconvénient des égouts simples, sans chéneaux ni gargouilles, et qu’il fallût en établir dans un intérêt de conservation, on ne saurait donner à ces chéneaux neufs un style particulier : il faudrait alors, afin de laisser au monument primitif toute sa pureté, se contenter de placer sur les corniches, et à la place de coyaux des combles, des chéneaux en plomb d’une grande simplicité, avec des gargouilles saillantes, également en plomb. S’il s’agit d’entretenir ou de réparer des chéneaux et gargouilles appartenant à des édifices élevés depuis le xiiie siècle, l’architecte devra conserver scrupuleusement le système ancien d’écoulement des eaux ; car ce système est inhérent à ces édifices mêmes, il influe sur leur forme : le changer, c’est ôter à la construction de ces monuments sa signification, c’est mentir à leur construction, et, par conséquent, tomber dans des inconvénients plus graves encore que ceux que l’on prétend éviter. En effet, le système alors adopté consistait : 1° à diviser les eaux pluviales le plus possible et à les conduire à ciel ouvert ; 2° à débarrasser les bâtiments des eaux pluviales par le plus court chemin, et par conséquent le plus promptement possible. C’est ainsi que, dans les grands édifices de cette époque, on voit les eaux, partant du chéneau des grands combles, couler rapidement dans des rigoles posées sur chacun des arcs-boutants comme sur un aqueduc, et s’échapper à l’extrémité des culées de ces arcs-boutants par des gueulards qui, posés horizontalement, ont quelquefois plus de 2 mètres de saillie sur le nu des contre-forts. Quant aux eaux qui tombent, soit sur les combles des bas côtés, soit sur ceux des chapelles, elles s’écoulent de même directement par un grand nombre de gargouilles, qui, posées le plus en dehors possible des constructions, aux angles des contre-forts par exemple, divisent les eaux en une infinité de jets tombant immédiatement et sans ressauts sur le sol.

Vers le xviie siècle, beaucoup de ces caniveaux et gargouilles qui, dans nos grands édifices religieux, fonctionnaient depuis trois ou quatre siècles, se trouvaient détériorés par suite de la mauvaise qualité de la pierre, ou par un long usage, souvent aussi par défaut d’entretien. Ces gargouilles égueulées, brisées même, ces longs caniveaux des arcs-boutants rongés par la mousse, qu’aucune main ne venait enlever, laissaient les eaux suinter de tous côtés ; les soubassements, balayés par ces jets poussés par le vent, montraient