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numents à entretenir ou à réparer est indispensable, non-seulement pour reproduire les formes extérieures, mais aussi pour connaître la construction de ces édifices, leurs points faibles et les moyens à employer pour améliorer leur situation. Ainsi l’architecte observera qu’au nord de la Loire les constructions dites romanes sont, jusqu’à la fin du xiie siècle, élevées en petits matériaux ; que les murs, composés de deux parements de pierre sans liaison entre eux, sans boutisse, contiennent dans leur milieu des blocages plus ou moins solides ; que souvent, par suite de cette disposition vicieuse, les parements se séparent et laissent entre eux et le blocage central des vides dangereux. Ce n’est donc qu’avec les plus grandes précautions que ces constructions peuvent être réparées ; alors les étais ne suffisent pas toujours, parce qu’on risque de les appuyer sur des murs soufflés, et de causer leur rupture et leur ruine. Dans ce cas, il est prudent de s’assurer par des sondages, avant de rien entreprendre, de la solidité des massifs intérieurs et de leur degré de résistance. S’ils n’offrent pas une masse solide, il est nécessaire de relancer tout d’abord, et de distance en distance, des pierres formant parpaing, et qui relient les deux parements ; après quoi, on peut reprendre successivement, et toujours par tranches verticales, les portions des parements qui sont mauvaises ; on évitera les crampons en fer, et, autant que possible, on remplacera les massifs altérés par une plus forte queue donnée aux pierres de leurs parements.

D’un autre côté, l’architecte remarquera que les constructions des xiiie et xive siècles sont généralement bien liées, et que les murs, minces d’ailleurs, sont composés de pierres portant fréquemment toute l’épaisseur de ces murs. Dans ce cas, mieux vaut laisser des parements dégradés à la surface que de les remplacer par des carreaux de pierre sans profondeur ; car ce serait remplacer une bonne construction par une autre moins durable.

Quant aux édifices du xve, construits presque toujours et de préférence en pierre tendre, ils sont composés de matériaux d’une forte dimension. L’architecture de cette époque, évidée à l’excès, n’a de stabilité qu’à la condition d’être montée en grands matériaux ; on ne saurait sans imprudence remplacer les parties dégradées sans conserver la grandeur de l’appareil : c’est le cas plus que jamais d’éviter les rapiéçages, qui altèrent toujours la solidité d’un édifice.