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DE L’ASIE FRANÇAISE


LE CHEMIN DE FER DE BAGDAD

Le premier coup d’œil attentif sur la carte de l’Asie Mineure fait prévoir clairement la formation de son réseau de chemins de fer et à défaut d’autres causes en expliquerait la petitesse et le décousu.

Ce grand plateau central, sec et médiocrement peuplé qui occupe plus des trois quarts de la péninsule, — borné au Nord par la chaîne Pontique, au Sud par les escarpements du Taurus, empâté à l’Est par les massifs tourmentés de l’Arménie, défendu à l’Ouest par l’enchevêtrement des chaînes de Pamphilie, de Carie et de Lydie, s’ouvre mal au rail et n’a relativement pas grand-chose à lui offrir.

La vie et la richesse qui jadis l’avaient pénétré jusqu’à le remplir d’histoire se sont concentrées sur sa périphérie, sur les plages étroites de la mer Noire, sur les côtes déchiquetées de la mer Égée. De même, lorsqu’on descend du plateau vers le Tud, c’est par delà le désert syrien, à l’étroite bande de Syrie et de Palestine, c’est par delà les steppes de la Haute Mésopotamie, à la plaine de Bagdad qu’il faut aboutir pour retrouver des régions prospères et peuplées.

Ce sont elles qui ont tenté les premiers demandeurs de concessions. Ils visaient soit l’exploitation des riches vallées côtières du Méandre, du Caïstre et de l’Hermos que les lignes d’Aïdin et de Cassaba relient à Smyrne, soit la jonction à la côte d’une ville importante de l’intérieur, Jérusalem à Jaffa, Damas à Beyrouth, Adana à Mersina, Brousse à Moudania.

Réseaux intéressants, d’autant plus que, sauf le Smyrne-Aidin, ils sont entre des mains françaises, se suffisant presque tous à eux-mêmes, mais courts et isolés et gardant, en fait, sinon dans le rêve de leurs promoteurs, un caractère accentué d’intérêt local.

Au reste, pour relier entre eux et avec Constantinople les ports de la mer Noire ou pour joindre la Palestine à la Syrie, il n’est pas douteux que la voie de communication d’intérêt général n’est pas un chemin de fer ; c’est la mer qu’il serait également inutile et improductif de doubler.

Mais elle ne baigne ni l’Arménie turque, ni la frontière persane, séparées de la capitale de l’Empire par 1 500 ou 2 000 kilomètres, et si la plaine mésopotamienne aboutit au golfe Persique, le périple arabique comporte un détour d’un millier de lieues.

La jonction de ces provinces à la Turquie européenne et méditerranéenne par une sorte de grand