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inégales, séparées par un large vallon : ses bords s’élevaient à pic, à l’exception du côté d’où la vapeur sortait avec plus d’abondance ; celle-ci s’échappait visiblement de la surface de la mer, et même à une assez grande distance (30 à 40 pieds.) Les arêtes vives des escarpements, la couleur d’un brun brillant et parfois gras de ces faces abruptes, la forme générale de l’île rappelaient un massif de roches solides ; et si, me laissant guider par l’analogie, j’avais dû m’en tenir à des conjectures, j’aurais cru avoir sous les yeux un cirque formé par du basalte, de la serpentine ou du porphyre, figurant un véritable cratère de soulèvement, dans le centre duquel l’eau de la mer serait venue s’engouffrer, ainsi qu’on l’a avancé dans des relations précédentes ; toutes ces apparences m’auraient conduit à une erreur, ainsi que les observations des jours suivans me l’ont démontré.

La nuit du 27 au 28 fut encore très-orageuse et la mer était très-forte. Le 28 au matin, nous pûmes cependant approcher jusqu’à deux milles, et voir alors distinctement que la vapeur s’élevait, non seulement de la mer, mais encore d’une cavité séparée de celle-ci, par un bord très-mince, du côté du sud.

Quoique nous voyions la mer briser avec une grande violence sur toute la circonférence de la falaise à pic, je demandai au capitaine à faire une tentative ; un autre motif d’appréhension était la couleur d’un jaune verdâtre de l’eau qui entourait, l’île, couleur qui contrastait avec celle d’un bleu indigo de la pleine mer, et qui semblait annoncer soit des écueils, soit des courans rapides, dans une eau modifiée par l’action volcanique souterraine.

À midi la mer était un peu tombée, capitaine voulut bien faire mettre un canot à notre disposition. En moins d’une heure, nous arrivâmes sur les brisans ; nous reconnûmes alors que ceux ci étaient produits par la lame qui venait frapper avec force contre une plage courte, et terminée brusquement par une pente rapide et non par des roches solides. L’eau vert-jaunâtre dans laquelle nous étions et qui était couverte d’une énorme écume rousse, avait une saveur sensiblement acide, toutefois moins amère, que celle de la grande mer. Sa température était aussi plus élevée, mais de quelques degrés seulement, de 21 à 23° O. Nous sondâmes à environ 30 brasses du rivage, et nous trouvâmes le fond à 40 ou 50 brasses.

Nous nous étions dirigés vers le seul point où, de la surface de l’île, on peut descendre par une pente douce vers la mer ; c’est une espèce de golfe.