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Théodore de Neuhoff

Alors commença la période la plus curieuse peut-être de son existence. Partout où il va les émissaires génois le suivent pas à pas et le font, à plusieurs reprises, arrêter. À Florence, à Rome, à Paris, en Holande, il doit se cacher pour échapper à leurs dénonciations et même à l’assassinat, car sa tête a été mise à prix. Emprisonné pour dettes à Amsterdam, il réussit à se faire rendre la liberté et organise une compagnie commerciale, commanditée par des négociants hollandais, qui se chargera d’exploiter la Corse. Il enverra des munitions et des approvisionnements ; ceux-ci les rembourseront en huile, chataignes et autres produits. Mais les Génois d’un côté, les Français de l’autre qui viennent de débarquer dans l’île, pour hâter la pacification, paralysent les efforts de Théodore. Les trois navires qu’il affrète ne peuvent pas débarquer leur cargaison ; lui-même, avec le vaisseau l’Africain obtient un insuccès identique. Entouré d’espions et de traîtres, il se confine en Italie dans une mystérieuse retraite et s’efforce de réchauffer le zèle de ses partisans par des lettres, que son neveu Frédéric apporte chefs. Mais, après une heure d’enthousiasme, le découragement vient : Frédéric, abandonné par son oncle, lutte de son mieux et cède enfin devant les forces de Maillebois (1740).

Cet échec de Théodore n’avait fait qu’augmenter sa célébrité. La caricature s’était emparé de lui. Une gravure allemande ridiculisait « Le satyre visionnaire ou le rêve à l’état de veille dont l’image représente dérisoirement Théodore, premier et dernier en sa personne, pseudo-roi des Corses rebelles ». Mais si les uns se moquaient, les autres croyaient vraiment à la réussite ou à l’influence du comte de Neuhoff. Ainsi la sous-prieure du couvent des Saints Dominique et Sixte, Madame Angélique Cassandre-Fonseca qui dirigeait les politiques du baron à Rome et en faisait « un