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ont témoigné ouvertement leur hostilité contre des représentations qu’ils n’organisaient pas mais je ne crois pas que cet incident prouve grand’chose.

Il nous est raconté dans le Diarium du collège de Sélestat, publié en 1876 par l’abbé Geny (Quellenschriften <~er Elsassischen Kirchengeschichte, Strasbourg, In-8°, fasc. !H et IV). En 1721, les officiers du régiment de Boisset demandèrent au Père directeur la permission de jouer entre eux, sur son théâtre, des tragédies de Racine "~ranMfa gallica quae ex Racin, gallico aurore, desumpsere ». Le directeur refusa les représentations eurent lieu dans le local corporatif des tonneliers, « sub tribu vinetorum ce dont le rédacteur du journal se félicite, car ces réunions ont duré fort tard, jusqu’à dix et onze heures, « in seram usque noctem subinde ad decimam et un~ec/mom on avait invité des individus de différents sexes, « concocarun~ varii sexus Aomme! on a crié et fait tapage « non sine sirepitu, clamoribus que! ennui si tout cela s’était passé dans t’étabtissement « quae utique molestiae summae nobis fuissent, si scholas nostras !M concessissemus ». Les bons régents veulent avoir la paix chez eux, mais ils ne craignent nullement que ces amusements d’amateurs fassent concurrence à leurs propres fêtes ils n’ont pas un mot de réprobation pour ce théâtre d’amour du janséniste Racine qu’on se propose d’introduire dans leur maison. Est-ce là vraiment une opposition de principe ?

En fut-il autrement à Saint-Omer ? Il se peut, mais j’en doute. Pourquoi les Jésuites auraient-ils combattu au XVJH’* siècle ce qu’ils avaient au moins toléré pendant 150 ans ? Vers 1720, les comédiens ne colportent pas encore le répertoire philosophique Voltaire débute à peine au théâtre, et je crois j’espère donner bientôt mes raisons que ses tragédies ne se répandirent en province ni très vite ni très facilement. Aussi bien l’autorité ecclésiastique conservait peut-être encore ce droit de censure que vous signalez au xvu~ siècle à tout le moins il était facile aux Pères, sans pourchasser les comédiens, de faire éliminer par les autorités civiles les pièces qui leur déplaisaient, dans cette ville où ils restèrent jusqu’au « coup de foudre de 1762 « plus puissants que le Magistrat, plus écoutés que l’Évêque, plus obéis que le Gouverneur militaire (Deiamotte et Loisel, Origines <ft< Lycée Je Saint-Omer, Calais, 1910, In-8°, p. 143). Jusqu’à plus ample informé, je croirais plus volontiers que l’arrêt de la vie théâtrale, de 1721 à 1763, fut amené par des circonstances -militaires et économiques l’effectif de la garnison n’aurait-il pas été, vers cette époque, sensiblement réduit ? Les