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1310[1], Philippe le Bel fit brûler vifs, en pleine campagne, près de l’abbaye de Saint-Antoine-des-Champs, cinquante-neuf Templiers reconnus coupables des crimes dont on les chargeait par une assemblée des évêques de la province de Sens tenue à Paris. Devant le peuple, ils protestèrent de leur innocence, au moment de subir le supplice. Peu après, cinq autres furent encore brûlés. L’ordre du Temple ayant été supprimé, le 22 mai 1312, au concile de Vienne, ses biens furent donnés aux Hospitaliers. À la suite de la suppression de l’ordre, le pape s’était réservé le jugement du grand maître Jacques de Molai et de trois des principaux de l’ordre, dont Gui, commandeur de Normandie, frère du dauphin d’Auvergne. Il envoya à Paris les cardinaux Nicolas de Fréauville, Arnaud d’Auch et Arnaud Novelli pour les juger[2]. À cet effet, ils firent dresser devant le portail de Notre-Dame un échafaud sur lequel les quatre accusés montèrent. On lut la confession qu’ils avaient faite et la sentence qui les condamnait à la prison perpétuelle. À la suite de cette lecture, Jacques de Molai et Gui se rétractèrent, disant que tout ce qu’on avançait contre leur ordre était faux et qu’ils étaient prêts à souffrir la mort pour soutenir cette vérité. Les cardinaux les remirent alors entre les mains du prévôt de Paris, qui les reconduisit en prison. Le roi, averti, fit conduire le soir même, soit le lundi 18 mars 1314, Jacques de Molai et Gui dans une petite île de la Seine du domaine de l’abbaye Saint-Germain-des-Prés, entre les jardins du roi et les Augustins, où ils furent brûlés vifs. Les deux autres Templiers furent emprisonnés[3].

Peu après, au mois de mai 1314[4], éclata à Paris le scandale des brus de Philippe le Bel, à la suite de la dénonciation par Isabelle, reine d’Angleterre, des relations que ses belles-sœurs, Marguerite de Bourgogne, femme du futur Louis X, et Blanche de Bourgogne, femme du futur Charles IV le Bel, entretenaient avec les deux frères Philippe et Gautier d’Aulnay. Arrêtées toutes deux, en même temps que Jeanne de Bourgogne, femme du futur Philippe V le Long, accusée de complicité, elles furent conduites, les deux premiers au château Gaillard, pour y être enfermées le reste de leurs jours, et Jeanne à Dourdan. Quant aux frères d’Aulnay, ils furent écorchés vifs à Pontoise sur la place du Martroi, le vendredi après Quasimodo, 19 avril 1315. Peu de jours après, le 30 avril, Marguerite mourut au château Gaillard ; rien, d’après les témoignages contemporains, ne peut autoriser à dire, comme on le répète trop souvent que Louis le Hutin l’a

  1. Grandes Chroniques, éd. J. Viard, t. VIII, p. 272-273.
  2. G. Lizerand, op. cit., p. 346-347.
  3. Voir Chronique latine de Guillaume de Nangis, éd. H. Géraud, t. I, p. 402 à 404.
  4. Marcellin Boudet, Thomas de la Marche, p. 35.