Page:Buisson, Rapport fait au nom de la Commission de l’enseignement chargée d’examiner le projet de loi relatif à la suppression de l’enseignement congréganiste - N°1509 - Annexe suite au 11 février 1904 - 1904.pdf/30

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Elle supprime de notre législation scolaire l’enseignement congréganiste, elle supprime de notre législation ecclésiastique les congrégations enseignantes. Elle ne va pas au delà.

D’abord, elle ne s’étend pas à toutes les congrégations. Sur 1.300 congrégations de femmes qui existent en France en nombres ronds, elle en supprime à peine 300, celles qui sont spécialement et exclusivement enseignantes. Dans les autres, elle ferme les écoles sans toucher au reste, laissant durer le statu quo sans le renforcer par aucun nouvel enregistrement de statuts.

Ensuite, même en matière d’enseignement, elle ne s’étend pas au clergé séculier. Elle le laisse en possession des droits que lui donne la législation et la jurisprudence en vigueur depuis le Concordat non seulement pour les séminaires, mais pour tout l’enseignement secondaire libre.

A la différence des propositions de MM. Levraud et Madier de Montjau, ce projet n’interdit pas aux ministres des cultes ce qu’elle interdit aux congrégations.

Et pourtant, ont dit plusieurs membres de la Commission, les raisons qui valent contre le religieux valent contre le prêtre. S’il ne s’enferme pas dans une vie absolument étrangère au monde, il est revêtu d’autre part d’un caractère sacré, et ses fonctions officielles lui donnent une autorité toute spéciale qu’il ne peut ni cumuler avec l’enseignement ni surtout mettre au service de son rôle de professeur.

Un de nos collègues, M. Devèze, avait même déposé en ce sens un amendement[1] qu’il a retiré pour se conformer à la méthode de division du travail proposée par le Gouvernement et adoptée par la Commission. Il a été d’ailleurs entendu que l’abandon de la disposition relative au clergé séculier n’impliquait nullement de la part de la Commission un vote de rejet. Elle n’a voulu qu’alléger le projet de tout ce qui n’en faisait pas nécessairement partie intégrante et le limiter ainsi à ce qui en est l’objet propre, savoir la suppression des congrégations enseignantes.

Mais même dans ces limites, demande-t-on, la loi va-t-elle atteindre son but ?

Non, car, la congrégation dissoute, les congréganistes continueront d’enseigner. Qu’y aura-t-il de changé ? Le costume, sans plus.

Votre Commission ne s’est laissé arrêter ni par cette accusation d’insuffisance ni par cette menace d’organisation de la fraude.

  1. « L’enseignement est interdit : 1° aux congrégations ; 2° au clergé séculier, à l’exception des grands et petits séminaires ».