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LES JEUNES BARBARES

Maintenant, qu’est-ce que cela me fait, à moi, que ce soit le jeune Calixte Radiguet ou monsieur Chrysostôme Pâturot qui ait écrit les choses inquiétantes que je viens de signaler ? Je ne connais pas leur auteur, je ne l’ai jamais vu de ma vie, je ne sais pas s’il est d’un blond d’Allemand ou d’un blond de Cosaque. Le saurais-je que cela ne ferait absolument rien. Il n’y a pas ici de question personnelle, mais une question extrêmement sérieuse pour nous. Il s’agit de mettre un frein à ce débordement, soi-disant littéraire qui achève de nous faire passer pour des êtres réellement inférieurs, et qui révèle aux yeux de l’étranger notre véritable condition intellectuelle, la plus déplorable qu’il y ait au monde.

Avec notre baragouin littéraire, qu’on a proposé dernièrement d’exhiber à Chicago comme on exhiberait les ustensiles d’un troglodyte, nous mettons le sceau à notre misérable éducation et nous donnons aux autres peuples toutes les raisons possibles de ne pas savoir où nous classer dans la famille humaine. Si, comme le Canada-Revue et la Patrie l’ont fait remarquer, à propos de la présence des marins français dans le port de Montréal, nous sommes les véritables enfants de la civilisation, qu’est-ce donc en matière de littérature ? On ne saurait croire tout ce qu’il y a d’enfantillages et de niaiseries, sans compter les énormes fautes de langue et de style, dans la plupart des ouvrages qu’on aurait le malheur de choisir pour aller faire rire de nous à quatre cents lieues de ce qu’on appelle l’Athènes du Canada, une Athènes où il n’y pas la plus petite biblio-