Mais voici un autre phare, dont l’éclat rouge de feu commence à pâlir au milieu des nappes flottantes du brouillard ; ces nappes se déploient, au matin, sur la surface du lac, ou s’étagent en cercles plus ou moins resserrés, de la base au sommet des montagnes lointaines. C’est le phare du cap Tonnerre, cap légendaire et redoutable dont la forme simule une tête, des jambes et des bras croisés sur une vaste poitrine. Aussi les Indiens croient-ils que c’est le grand Manitou qui est là, étendu, sur le lac, dormant d’un sommeil séculaire, sous l’aspect d’un rocher géant, et ne manquent-ils pas, lorsqu’ils glissent près de lui, dans leurs rapides et fragiles canots, de lui jeter des torquettes de tabac, pour se le rendre favorable. Ce tabac, paraît-il, est un narcotique puissant, même pour les dieux, puisque le cap Tonnerre ne s’est pas réveillé de temps immémorial.
Nous tournons ce Manitou de pierre que les Indiens croient entendre ronfler, lorsqu’il retentit des éclats de la foudre, et nous entrons