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cile la part des avantages et des agréments de la vie. Ils le jalousent et le détestent ; ils le regardent comme une superfétation, une excroissance sociale ; ils le comparent à la mouche qui se pose sur le miel, sans souci et sans remords, occupée uniquement de se repaître. Ils le voient de toutes les fêtes, assis à tous les banquets, jouissant de tous les plaisirs, et ils se demandent ce qu’il lui en coûte, par quel équivalent d’ennuis domestiques et de compensations tracassières il paiera tout ce bonheur apparent. On ne pardonne pas au célibataire d’avoir l’air exempt des misères générales, de se faire un trône indépendant au sein des arrière-pensées qui assaillent les autres hommes, et des retours vexatoires qui menacent chacun de leurs plaisirs.



Que vient-il faire au milieu de nous, lui qui n’est pas des nôtres ? Si son existence est à part, pourquoi vient-il la confondre avec l’existence de tous à l’heure précise des réjouissances ? Pourquoi ne vient-il que pour cueillir, et que lui en coûte-t’il pour ramasser toutes ces fleurs, lui qui n’a creusé aucun sillon ? Ce qu’il lui en coûte ! Ah ! Vous ne le savez pas, vous qui le voyez mêlé aux mascarades de la vie, comme si elles n’avaient pas de lendemains ; vous qui le voyez à toutes les fêtes, à toutes celles qui paraissent, oui ;