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dessin ferme et pur, s’harmonise agréablement avec l’ensemble du paysage. En face, à une lieue au large, s’étend la gracieuse, l’élégante île de St. Barnabé, île protectrice qui défend Rimouski des vents du nord, qui reçoit sans distinction rêveurs et pique-niqueurs, également hospitalière à tous, qui ne demande pas mieux que de se faire tondre par les nombreux visiteurs à court de bois, et qui n’a véritablement pas de défauts, malgré ce qu’en disent les baigneurs qui vont se jeter à l’eau sur son rivage, s’y gèlent en une seconde et se plaignent ensuite de ce que l’île ne les réchauffe pas.



Dans Rimouski il y a plusieurs genres de beautés ; la beauté ample, à découvert, sans obstacle devant la vue, beauté libre et souveraine que le majestueux St. Laurent déploie dans son cours. Il y a la beauté pittoresque et gracieuse, nourrie d’inattendus, abondante en détails, pleine de capricieux désordres, de promesses interrompues, de séductions, de détours et de fallacies savamment ménagées pour le plaisir de l’âme et des yeux ; c’est la beauté qu’offrent dans son cours furtif la rivière Rimouski et ses rives tantôt dérobées, tantôt étalées en plein soleil sous la chaude averse des rayons d’été ; çà et là bordées d’épaisses touffes d’arbrisseaux qui jettent une ombre silencieuse sur des eaux profondes et claires comme le cristal, ou