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Mais, qu’est-ce que c’est que le quai de St. Denis ? C’est un de ces quais gigantesques, variant de sept à douze arpents en longueur, et qu’avait fait construire il y a vingt-trois ans, feu M. François Baby, le plus grand, le plus intelligent et le plus fin jobbiste public qu’on ait encore vu au Canada.

D’abord, un peu de topographie pour s’orienter. Entre St. Denis, paroisse chenue et chétive qu’habite M. le sénateur Chapais, et la Rivière-Ouelle où notre Lieutenant-Gouverneur renferme ses Lares, il y a une longue langue de terre qui s’avance parallèlement au fleuve en s’écartant de la ligne de côtes d’environ trois milles. Cette langue de terre s’appelle la Pointe à l’Orignal, parce qu’il n’y a jamais eu là que des corneilles et des anguilles ; de l’extrémité ouest de cette pointe s’élance le quai, en s’allongeant jusqu’à ce qu’il atteigne l’eau profonde ; cela l’oblige à avoir sept arpents de long. C’est là que le Rival arrive tous les matins à neuf heures et d’où part immédiatement une diligence qui emporte la malle et les passagers à la station du Grand-Tronc, huit milles plus loin.

La Pointe-à-l’Orignal est située à deux lieues environ de chacune des deux églises de St. Denis et de la Rivière-Ouelle, et peut être regardée comme le site le plus désert, le plus sauvage, mais en même temps le plus pittoresque, le mieux dégagé de tout ce qui pourrait modifier sa physionomie naturelle, et le mieux disposé pour offrir une vue d’ensemble de toute la côte qui s’élève en face de lui. Singulier endroit