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rature aux pauvres diables qui n’en ont pas d’autre et qui pourraient en tirer quelque chose, s’il n’était pas envahi par les plantes destructives.

Nous n’avons besoin de personne en Canada qui fasse concurrence au style de Gagné, et le moins que nous puissions réclamer de ceux qui prennent une plume, c’est qu’ils aient quelque notion de grammaire jointe à un peu de sens commun, et qu’ils ne torturent pas sous nos yeux la pauvre langue échappée à la conquête, consolation et espoir des canadiens depuis plus d’un siècle. Le moins que nous puissions réclamer du président d’une société littéraire, d’un homme dont le nom paraît à tout bout de champ dans les journaux comme auteur, tantôt d’un livre, tantôt d’un mémoire, tantôt d’une brochure, tantôt de çi, tantôt de ça, d’un homme qui va jusqu’à revendiquer au nom de la langue française et se constituer comme son chevalier, voire même comme son protecteur en Canada, d’un homme qui a été appelé charmant écrivain par Mr. Gaillardet qui ne soupçonnerait même pas encore son existence, si le complaisant et perfide Mr. Chauveau ne la lui avait révélée, d’un homme enfin qui ne peut se résoudre à écrire deux lignes sans en faire part au public, le moins, dis-je, que nous puissions réclamer de lui serait, bien modestement, de connaître la signification des mots les plus ordinaires et ne pas les entasser pêle-mêle, sans construction, sans raison, sans à-propos ni convenance, comme s’il en était le maître et qu’il pût les arranger à sa guise.