en compte jusqu’à vingt-cinq en arrière des paroisses de Saint-Raymond et de Saint-Gabriel, dans un petit espace de cent milles carrés à peine. Lorsqu’à la suite de la période glacière, qui couvrit jadis la plus grande partie du globe et qui dura plusieurs milliers de siècles, le continent nord-américain émergea petit à petit de son linceul de glace, il se montra avec de terribles blessures, les côtes enfoncées, le dos troué en mains endroits, son épaisse croûte entamée et lacérée dans les parties les plus vulnérables. C’est dans ces blessures restées béantes que la glace s’arrêta, s’engouffra, se fondit et forma les lacs qui ont pris, dans la suite des temps, avec l’apparition des Canadiens sur le sol qu’ils habitent, les noms divers et infiniment nombreux que l’on voit sur les cartes. Ce sont eux pour la plupart que nous sillonnons encore aujourd’hui, comme le faisaient nos pères, dans de frêles canots d’écorce, en chantonnant des refrains canadiens, sans nous douter que cinquante mille siècles nous contemplent !
Les lacs forment les étapes successives de ce pays si sauvage et si magnifique. Et voyez par quel étrange effet d’une destinée sans doute préconçue, presque tous ces lacs se trouvent sur le parcours même de la ligne, je parle des principaux d’entre eux, de ceux qui ont un nom, car le nombre des lacs minuscules, éparpillés çà et là à une distance plus ou moins grande de la voie ferrée, est presque incalculable.