Eh bien ! Grâce au travail opiniâtre de la compagnie du Lac Saint-Jean, tout ce que j’avais entrevu et ce que j’avais annoncé dans ce qui fut longtemps après encore un désert, s’est réalisé, même bien avant le terme que j’assignais dans mon imagination. L’œuvre entreprise et menée à fin par la « Compagnie » a galvanisé le peuple du Lac Saint-Jean qui se mourait de découragement et d’inanition ; elle lui a rendu la vie, a introduit un sang nouveau dans ses veines, lui a imprimé un élan qui se traduit par toute sorte de progrès et d’essais, et nous a dotés pour ainsi dire d’une petite province qui est comme un organe essentiel dans le corps de la grande province de Québec. Deux vallées dont nous déplorions l’isolement, celle du lac Saint-Jean et celle du Saint-Maurice sont déjà reliées entre elles par le chemin de fer des Basses-Laurentides, et elles le seront doublement bientôt par une nouvelle ligne allant du Lac Édouard à La Tuque. En outre, avant qu’il se soit écoulé deux années de plus, la vallée du Saint-Maurice sera reliée à celle de l’Outaouais par la voie ferrée du Grand-Nord, qu’il n’est plus nécessaire que de compléter.
Et quant aux villages nouveaux, aux coquettes villas, aux beaux grands hôtels, style américain, dont j’entrevoyais les invitantes silhouettes se dresser sur les bords du lac, ils y sont, ils ont poussé comme sous le coup d’une baguette magique, et nul ne pourra hésiter à mettre l’hôtel de Roberval en parallèle avec les hôtels de premier ordre de n’importe quelle ville de l’Amérique.