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ensuite jusqu’à Tadoussac, après avoir parcouru, en se dirigeant toujours vers l’est, une distance de quarante lieues. Sa largeur varie comme celle de toutes les rivières ; mais elle est rarement de moins d’un mille, tandis que, à partir de la baie Ha ! Ha ! jusqu’à sa sortie dans le Saint-Laurent, elle est le plus souvent d’un mille et demi, et quelquefois de deux milles.

La mer y monte jusqu’à un endroit appelé Terre-Rompue, mais dont le véritable nom devrait être « Interrompue », parce que la navigation n’est plus possible au delà. Cet endroit est à quatre-vingt-huit milles de l’embouchure du Saguenay et à trente-cinq milles environ de la décharge du Lac ; les rapides et les cascades viennent y mourir après une suite d’élans échevelés. Quant au cours du Saguenay, depuis Terre-Rompue jusqu’au Saint-Laurent, il est extrêmement rapide, et le reflux de la marée se fait sentir jusqu’à plusieurs lieues au large du grand fleuve, en faisant dévier parfois la course des navires.

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La rivière Saguenay est un gouffre profond parfois de mille pieds, taillé en plain granit, au sein d’énormes entassements de montagnes, par un terrible cataclysme qui remonterait aux plus lointaines époques, si l’on peut s’en rapporter à l’attestation géologique, aux témoignages offerts par l’étonnante physonomie du sol, par l’image de bouleversements répétés, par les épaisseurs profondes