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IX


CONTRÉE LACUSTRE


Des lacs, des lacs ! Il y en a partout, à profusion, sur toute la surface de l’Amérique Septentrionale, des rives du Nouveau-Brunswick à celles de la Colombie Anglaise, et particulièrement dans le nord de notre province. On en compte jusqu’à vingt-cinq en arrière des paroisses de Saint-Raymond et de Saint-Gabriel, dans un petit espace de cent milles carrés à peine. Lorsqu’à la suite de la période glacière, qui couvrit jadis la plus grande partie du globe et qui dura plusieurs milliers de siècles, le continent nord-américain émergea petit à petit de son linceul de glace, il se montra avec de terribles blessures, les côtes enfoncées, le dos troué en maints endroits, son épaisse croûte entamée et lacérée dans les parties les plus vulnérables. C’est dans ces blessures restées béantes que la glace s’arrêta, s’engouffra, se fondit et forma les lacs qui ont pris, dans la suite des temps, avec l’apparition des Canadiens sur le sol qu’ils habitent, les noms divers et infiniment nombreux que l’on voit sur les cartes. Ce sont eux pour la plupart que nous sillonnons encore aujourd’hui, comme le faisaient nos pères, dans de frêles canots d’écorce, en chantonnant des refrains canadiens, sans nous douter que cinquante mille siècles nous contemplent !