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à construire une ligne de cent quatre-vingt milles seulement. Mais qu’on se reporte aux jours où cette entreprise fut commencée. À cette époque-là on en était encore aux premiers rudiments de la construction des voies ferrées ; tout était à créer à la fois et l’on manquait des moyens les plus élémentaires, les capitaux ne s’étaient pas encore exercés à la construction de chemins de fer purement provinciaux, et l’on avait à vaincre des obstacles bien autrement formidables que la chaîne des Laurentides ; c’étaient les montagnes de préjugés et de défiances qu’il fallait franchir ou du moins contenir, avant seulement de pouvoir se mettre en marche. Que de notions absurdes, indignes, ne se plaisait-on pas à répandre ! Que d’accusations pour flétrir le projet et ses auteurs ! Que de démarches pour le faire avorter ! Quoi ! l’histoire des origines et du développement du chemin de fer dont nous suivons les étapes serait une odyssée, je dirais presque douloureuse, s’il était permis d’appliquer une pareille épithète à une matière de ce genre, et si je ne craignais d’attirer des larmes sur le sort de capitalistes, chose qui ne s’est jamais vue !

Les insinuations malveillantes débordaient donc de tous côtés comme des éjaculations fétides ; elles provenaient surtout, on le conçoit aisément, des endroits et des gens à qui le chemin de fer allait être le plus profitable. On ne pouvait admettre qu’un sentiment patriotique, une vision claire de l’avenir, en dehors d’un intérêt parfaitement légitime, eussent inspiré avant tout les directeurs