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le lac Saint-Jean lui-même. Il y a dans ce pays plus d’eau que de terre ; cette dernière est hors d’état d’être soumise à la culture, n’étant formée que de masses de rochers, de falaises et de marécages où l’on peut marcher des milles entiers sans trouver d’autres arbres que quelques tamaracs. C’est là le domaine de l’orignal et du caribou qui traversent par bandes les vastes plaines, en ne se nourissant que de la mousse qui croît sur les rochers.

« Les sauvages qui chassent dans ce misérable pays, qui cependant abonde en animaux à fourrure de différentes espèces, ont beaucoup diminué en nombre (1827) depuis le temps où la compagnie du Nord-Ouest tenait les Postes du Roi et surtout depuis qu’on a introduit parmi eux des liqueurs fortes, dont ils font un usage si immodéré qu’ils en meurent. Lorsque la famine attaque une famille de Montagnais, c’est l’usage parmi eux que lorsqu’il en meurt un, victime de la faim, on l’enterre sur le lieu, et les autres transportent immédiatement le camp à un autre endroit, et ainsi de suite jusqu’au dernier survivant qui, alors, s’enfonce à l’aventure dans les bois jusqu’à ce qu’il succombe à son tour d’inanition.

La petite vérole, apportée avec les effets et les hardes qu’on leur donne en échange de leurs pelleteries, a souvent enlevé 50 à 100 personnes en un jour. Il n’y avait en 1829 qu’environ 50 à 60 familles qui faisaient le commerce aux postes de la Compagnie, tandis que, sans ces causes destructives, on en aurait pu compter cinq cents.