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plus les cris ; on se cherche, on s’appelle, mais c’est en vain ; toutes les voix sont étouffées, tous les échos sont assourdis… Enfin, dans la journée du 19, vers le soir, le vent commence à se calmer, un peu de jour se fait, et les colons, au nombre de 79, se trouvent réunis près d’une petite maison de vingt pieds dans laquelle ils cherchent refuge.

Heureusement personne n’a péri ; quatre enfants seulement avaient été horriblement brûlés, et l’un d’eux expirait quelques heures plus tard. La chapelle, le presbytère et ses dépendances avaient été la proie des flammes, et il ne restait dans la paroisse entière qu’une quinzaine de pauvres maisons pour abriter au delà de cent cinquante familles dépourvues de tout.

Cet incendie terrible laissera de longues traces dans la mémoire, non seulement des colons de Saint-Jérôme, mais encore de toute la vallée du Lac, car il porta partout ses ravages et détruisit la forêt sur une étendue d’une trentaine de lieues, de l’ouest à l’est. La compagnie de la Baie d’Hudson se hâta, la première, de porter secours aux plus nécessiteux, et des dons arrivèrent de toutes les parties du pays. En moins d’un an, la plupart des colons avaient rebâti leurs demeures, et une église de cent pieds de longueur sur cinquante de largeur était en voie de construction. Presque toutes les traces du fléau avaient disparu, et Saint-Jérôme renaissait de ses cendres plus florissant que dans une prospérité non interrompue.