et uniforme va-et-vient qui n’en donne pas moins au port une grande partie de son mouvement. À droite, s’étagent des chaînons bossués et ravineux qui, tantôt s’élancent et tantôt rampent, jusqu’à ce qu’ils aillent s’engloutir dans le bassin de la Grande-Baie. Ces chaînons, de granite compacte et ferme, sont tous arrondis et polis à leur surface comme l’acier ; on dirait qu’ils ont été lavés pendant un temps infini par des torrents que rien ne lassait. En maint endroit il s’en est détaché de gros fragments qui ont été rouler à plus ou moins de distance ; on voit la déchirure parfaitement sensible et comme encore récente, tandis que la surface est toujours lisse et pour ainsi dire lustrée. Qui a pu détacher ainsi ces gros fragments de roche, dont les molécules serrées et drues sont si adhérentes ? Sous l’action de quelle force inconnue, rapide comme l’éclair, s’est donc faite cette cassure si nette et si vive qu’on ne saurait l’attribuer à aucune cause de désagrégation ? C’est ce que nous tâcherons d’examiner dans un autre chapitre, en faisant remarquer dès maintenant que le même fait se reproduit ailleurs, dans la vallée du Lac, et que partout où il y a une série de rochers, comme sur toute la rive sud du lac Kenogami, ou des chaînons interrompus par des gorges profondes et des monticules d’alluvion, comme le long de la Belle-Rivière et sur le chemin qui conduit d’Hébertville à l’ile d’Alma, ces rochers et ces chaînons ont invariablement la même forme arrondie, comme celle de longues vagues pétrifiées, et la surface aussi polie, aussi lisse que l’ivoire lui-même.
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