l’accabler de sa déchéance, il essaya une dernière colère de géant, il ramassa ce qu’il lui restait de vagues, se souleva sur son lit mouvant, tremblant encore de tant de chocs formidables, et il voulut s’élancer à son tour à l’encontre de ces torrents improvisés qui ne savaient même pas leur course ni quel lit ils iraient se choisir le lendemain.
Mais, impuissant, vaincu d’avance, ayant à lutter non seulement contre les torrents déchaînés qui tombaient en avalanches de sommets en sommets, remplissant l’espace du tonnerre de mille chutes escaladées et franchies presque à la fois, mais encore contre les chaînes de rochers qui, maintenant libres, se dressaient en maint endroit devant lui, contre les immenses barrières de sable qui s’entassaient les unes sur les autres à l’embouchure des grands cours d’eau sans cesse occupés de grossir et de multiplier les obstacles, il retomba… comme un fauve épuisé sur le lit d’argile où il allait désormais s’ensevelir dans le morne repos des siècles. Longtemps il sommeilla sur cette tombe mouvante que lui firent les vagues de sable et d’alluvion tous les ans renouvelées, jusqu’au jour où des races d’hommes inconnus, hôtes errants des grands bois, vinrent sillonner son dos sur de frêles esquifs et le parcoururent en tous sens, à la poursuite silencieuse du gibier et des animaux à chaude fourrure dont pullulaient alors les forêts avoisinantes… Ah ! qu’on nous pardonne cette indigne esquisse de ce qu’aucune