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LA VALLÉE

unique et absolue, il y a trois ou quatre ans à peine ; en maint endroit les dernières souches calcinées ont disparu et de larges champs s’étalent sous le regard ; ailleurs elles subsistent encore et leurs troncs noirs, se consumant d’heure en heure, luttent en vain, avec les vigoureux épis qui les assiègent et les enveloppent, pour une dernière possession du sol qui les a vus naître, qui les a nourris et qui, maintenant, va se nourrir à son tour de leurs débris et de leurs cendres.


Beaurivage ne date guère que de dix-huit mois et déjà, il possède une station de chemin de fer auprès de laquelle s’étend, de jour en jour, le groupe naissant des habitations. Déjà, aussi, les colons qu’elles abritent ont été menacés, comme c’est la règle, par des spéculateurs de terrains qui prétendent avoir un droit antérieur au leur et leur faire payer cher le privilège de rester sur le champ défriché par eux-mêmes, après tous les travaux accomplis et tous les risques encourus. Mais il est rare que ces oiseaux de proie réussissent à autre chose qu’à inquiéter et à molester les détenteurs du sol ; souvent ils en sont pour leurs peines et sont obligés de subir des conditions, au lieu d’imposer celles qu’ils avaient rêvées.

À partir de Causapscal on a vite accompli le trajet qui mène à Humqui, un des centres les plus importants de toute la vallée. C’est là que la maison Price conduit sa