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LA VALLÉE

jamais dépasser un niveau uniforme, ne contient pas moins de treize cent mille acres de terre arable, d’une qualité supérieure, qui n’est surpassée dans aucune autre partie de la province. On l’assimile généralement aux plus belles parties des cantons de l’Est, tant au point de vue du climat qu’à celui du sol, ce qui veut dire qu’on la reconnaît comme éminemment propre aux établissements agricoles, sur une échelle variée.

Cependant, aucune fraction de ce fertile territoire n’a encore été livrée à la culture, si l’on en excepte les deux rives de la Matapédia et le voisinage immédiat des lacs dont nous venons de parler.




La colonisation n’y est pas encore parvenue ; elle a été arrêtée par la chaîne des Alléghanys, qui n’offre pas abondamment de passages faciles en arrière des paroisses riveraines de notre grand fleuve, en sorte qu’on a ignoré jusqu’à une date encore toute récente quelle était l’étendue et la valeur de ce beau domaine. Le défricheur n’y avait pas pénétré ; seul, le bûcheron y avait promené ses ravages pour le compte des marchands de bois, qui ont à peu près dépouillé toute la région de ses meilleures essences forestières. Si le colon, découragé de ne trouver qu’un sol avare dans les vallons des Alléghanys et fatigué déjà, peut-être, d’une lutte sans espoir pour assurer la subsistance de sa famille, avait eu la force de franchir la chaîne, il se serait trouvé en présence du plateau que nous venons de signaler et dont le sol, partout généreux, exempt de roches, d’une culture facile, lui aurait permis de fonder