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naires, dans les trains du Grand Tronc, qui eux, partent, avancent un peu et reculent deux fois plus.

Il est des âmes douces, compatissantes, bénignes, qui éprouvent le besoin de se dévouer et de faire le bien.

Mais le meilleur moyen qu’elles trouvent d’y parvenir est de s’enfermer dans un couvent, à l’abri des occasions innombrables d’être utiles qui se présentent dans le monde.

Livrées à la réclusion, au silence, compatissantes pour des maux qu’elles ignorent et qu’elles ne peuvent par conséquent secourir, elles laissent ainsi à d’autres le fardeau de la vie réelle dont elles évitent les ennuis et les combats.

Vous voulez faire le bien ! eh ! mon Dieu ! allez donc dans les campagnes instruire nos pauvres villageoises, allez fonder des écoles, donnez l’exemple de l’amour du prochain en rendant sa condition meilleure, en l’éclairant, en l’élevant.

C’est plus qu’un besoin, c’est une nécessité impérieuse pour nos campagnes plongées dans une si triste ignorance.

Ce n’est pas en marmottant des prières du matin au soir qu’on se rend utile aux hommes.

C’est en se mêlant à la vie active et en donnant l’exemple de la soumission aux devoirs que l’existence impose.

Vous qui vous soustrayez à l’accomplissement de ces devoirs, de quel œil voulez-vous qu’on vous regarde ?

Vous dites que le monde n’est pas fait pour vous, et que vous voulez pratiquer toutes les vertus dans le silence et l’obscurité.

Vous êtes faites pour le monde comme toutes les autres créatures, car en vous créant parmi vos semblables Dieu a voulu que votre place fût avec eux.

Vous ne pouvez vous affranchir de ce devoir sans manquer aux obligations de la destinée.

La vertu n’est pas ce qu’on la fait ; elle n’existe pas pour une classe d’êtres à part qui la mettent tout entière dans un mysticisme vague et énervant.

Elle consiste à bien faire tout ce que l’on fait, et la plus belle prière qu’on puisse adresser à Dieu est une bonne action et le devoir de chaque jour vaillamment accompli.

Je reçois la lettre suivante :

Monsieur,

Ce que vous racontez de Pie IX, qui s’apitoyait sur le sort des habitants d’une paroisse ruinée par une inondation, tout en empochant leur argent, me rappelle un trait de l’évêque Bourget, de même nature, mais encore un peu plus comique.

Une bonne partie de la ville de Montréal venait d’être détruite par un incendie, et l’on avait remplacé les maisons par des cabanes de planches. Sa Grandeur