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parce que je veux vous le montrer dans sa nudité béante, je veux te le faire voir, à toi, jeunesse endormie du Canada, à toi, peuple, qui jouis de ta servitude.

Je viens plaider aujourd’hui, devant l’histoire et devant la civilisation, la cause du peuple canadien, peuple vigoureux et intelligent, dont on essaie en vain de faire un troupeau stupide. Je la plaide devant les Anglais qui en sont venus à nous mépriser, ne pouvant s’expliquer comment nous aimons à ce point la soumission.

Remontons dans le passé de notre abaissement ; nous pouvons aller loin ; toutes les tyrannies, hélas ! ont des dates anciennes, la liberté seule n’a qu’un passé récent.

Lorsque les colonies, nos voisines, s’affranchirent et proclamèrent leur immortelle déclaration des droits de l’homme, elles firent d’éloquents appels aux Canadiens de se joindre à elles.

Mais nous n’écoutions alors, comme aujourd’hui, que la voix des prêtres qui recommandaient une soumission absolue à l’autorité. En vain Franklin vint-il lui-même, en 1775, offrir au Canada d’entrer dans la confédération américaine, lui garantissant telle forme de gouvernement qu’il lui conviendrait d’adopter et une liberté de conscience absolue, les mêmes lois et la même constitution que les États-Unis, il ne fut pas même écouté.

En même temps, le Congrès envoyait au Canada une invitation pressante et l’engageait à élire des députés qui le représenteraient dans l’assemblée générale de tous les États ; le comte d’Estaing, qui commandait une flottille au service de la cause américaine, nous écrivit de son côté une lettre chaleureuse où il disait que nous n’avions qu’à vouloir être libres pour le devenir… tous ces appels, toutes ces sollicitations à l’indépendance parvinrent à peine aux oreilles des Canadiens, ou furent étouffés sous les sermons et les mandements dans lesquels on ne prêchait qu’une chose, l’obéissance passive.

Ainsi la cause du peuple n’était déjà plus celle du clergé, et c’est lui cependant qui a osé se dire jusqu’à ce jour notre protecteur et notre défenseur !

Uni à la noblesse, le clergé conspira l’extinction de tous les germes d’indépendance nationale qui se manifesteraient. Ces deux ordres étaient tenus de servir obséquieusement la métropole, pour que rien ne fût enlevé aux privilèges ecclésiastiques ni aux privilèges féodaux.

Jouissant d’une influence incontestée, d’un ascendant sans bornes sur la population, ils s’en servirent pour enchaîner leur patrie. Ils déployèrent dans cette tâche une activité infatigable ; le clergé surtout,