Page:Buies - L'ancien et le futur Québec, 1876.djvu/37

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 37 —

s’embrasser en paix ; dans un immortel repos. Ce ne sont pas du reste nos remparts ni les foudres qui les surmontent que l’ennemi aurait à craindre aujourd’hui, et je crois qu’ils lui feraient moins de mal qu’à nous-mêmes ; les premiers nous voleraient à la figure en éclats si les projectiles modernes les battaient en brèche, et les seconds refuseraient de partir ou nous éclateraient dans les mains.

Mais revenons à ce qui nous reste à dire pour compléter ce tableau historique auquel le monument de Wolfe et Montcalm apporte le dernier et peut-être le plus touchant souvenir.

C’est le 1er novembre 1827 que lord Dalhousie, après plusieurs démarches pour remplir le pieux dessein qu’il avait formé d’élever un monument unique aux deux héros de la dernière guerre franco-anglaise en Amérique, réussit à rassembler pour cet objet un certain nombre de souscripteurs au Château St. Louis. Quinze jours après avait lieu la pose de la première pierre, au milieu d’une des plus mémorables solennités ; toute la garnison était sous les armes et toutes les sociétés en uniforme ; les francs-maçons se signalèrent et à eux revint l’honneur du principal rôle de la journée. C’est là qu’on vit, à l’âge de 95 ans, le vieux sergent Thompson, qui avait été le compagnon d’armes de Wolfe, venir donner sur la pierre ses trois coups de maillet d’une main qui ne tremblait pas encore. Dix mille personnes regardèrent pendant une minute à jamais solennelle ce vétéran centenaire qui semblait comme un siècle vivant, debout et en armes, venant déposer sur une pierre muette, et comme pour servir de base au monument qui allait s’élever, le monument impérissable de l’histoire. Puis, les canons de la citadelle retentirent et des feux de joie illuminèrent son front retentissant ; la fête se prolongea bien avant dans la nuit, et les mânes des deux héros, se promenant de concert, durent trouver qu’il y a singulière-