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le promontoire, sous forme de palissade, jusqu’à la grande batterie actuelle, que surmontaient trois canons.

De nos jours il y a là vingt canons de plus, accroupis sur leurs affûts, à 15 ou 20 pieds l’un de l’autre, le museau allongé sur le parapet qui borde le Sault-au-Matelot, prêts à vomir le feu, semblables à de grandes bêtes fauves qui vont s’élancer sur leur proie. Cependant, malgré leur aspect terrible, les boulets de ces canons là qui sont de 32 livres, feraient à peu près autant d’effet sur un monitor moderne qu’un pois-chiche sur un genou d’éléphant. Ces vingt-trois foudres de guerre n’attendent qu’un signal pour aller s’ajouter aux tuyaux de la compagnie du Gaz.

À la place des portes, il y avait d’énormes blocs et des boucauts remplis de terre, surmontés de petites pièces d’ordonnance ; le canon protégeait tout le pourtour de la haute-ville qui ne comprenait que quelques rues, dont la principale était la rue St. Louis, appelée Grande Allée, encore à moitié ombragée par la forêt, et où ne se trouvaient que quelques établissements militaires.

Le reste de la ville était encore occupé aux trois-quarts par d’autres établissements militaires et surtout par des maisons religieuses, tels que les couvents, les hôpitaux, les églises, le séminaire, le collège des Jésuites… auxquels aboutissaient tous les chemins, ce qui les rendait extrêmement tortueux, parce qu’il était impossible de suivre un plan régulier, chacun se bâtissant comme il le pouvait là où le roc était le plus facile. Il en résultait un double avantage ; c’est qu’on pouvait rassembler en un clin-d’œil sous la main toute la population, si un ennemi extérieur venait subitement à la menacer ; et, d’autre part, il n’y avait pas d’excuse possible pour ne pas aller à la messe. Aujourd’hui, le plan des rues n’a pas beaucoup changé ; seulement, il y en a qui font le tour des églises.