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le préjugé.

de la science. Ce fut comme une révélation, et l’histoire légendaire dut s’enfuir avec un cortège énorme d’enfantillages, qui avaient été jusqu’alors autant de choses reconnues, incontestées et incontestables.



Lorsque le grand Bacon, fatigué des incertitudes et des incohérences grossières au milieu desquelles se traînait péniblement la science, affirma qu’elle n’avancerait à rien sans la méthode et sans soumettre la nature entière à une expérience illimitée ; lorsque Newton, se plaçant résolûment en face d’un simple fait, peut-être le plus ordinaire d’entre tous, eut l’audace d’en rechercher la cause et qu’il y découvrit la grande loi universelle, celle de l’attraction ; lorsque Galilée, faisant, aussi lui, de l’expérience indépendante des textes et du préjugé commun, trouva la marche de notre planète en arrêtant pour toujours le soleil, ils ne savaient peut-être pas, tous ces grands hommes, qu’ils enfantaient un monde infini, qu’ils donnaient naissance à une humanité nouvelle pour qui le merveilleux et la fiction, c-à-d. le préjugé dans la science, allaient disparaître pour toujours ; ils ne savaient pas quelle impulsion ils donnaient tout-à-coup à l’homme lancé librement dans l’immensité, pouvant fouiller à son gré tous les mystères de la nature. Ils avaient révélé une loi ; cette loi appliquée a fait découvrir un monde de choses qui épouvantent l’imagination : ainsi, le soleil, que l’on regardait comme le satellite de la terre et qui est douze cent mille fois plus gros qu’elle, le soleil, avec son énorme cortège de planètes, dont une, Uranus, roule à 732 millions