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VOYAGES

large. La rivière Merced y pénètre par une série de chûtes qui tombent entre de véritables murailles de granit d’une hauteur de deux mille à six mille pieds. Ce n’est pas saisissant, c’est magique, c’est inconcevable, c’est un rêve de l’imagination dans un monde fabuleux. L’une de ces chûtes, la Ribbon, a jusqu’à trois mille trois cents pieds de hauteur, une autre deux mille six cents pieds, le Voile de la Vierge mille pieds, la Nevada sept cents pieds, la Vernal six cents pieds… etc… toutes encaissées étroitement entre des blocs formidables et tombant à pic comme si quelque main puissante les précipitait avec colère dans les entrailles sans fond de la nature.

À six heures du soir on atteint Brooklyn, petite ville formée surtout des résidences privées des marchands de San-Francisco. On traverse une rivière étroite et voilà Oakland avec ses chênes verts, ses vergers, ses parcs, ses jardins et ses vignobles. Oakland est noyé dans un océan de feuilles et de fleurs ; c’est la ville des cottages délicieux, parfumés, paisibles, enfouis sous l’ombrage. Sur le rivage, qui est celui de la baie même de San-Francisco, aboutit une longue jetée de deux milles environ, que suit le chemin de fer, et au bout de laquelle attend le ferry qui va traverser les voyageurs à la grande métropole du Pacifique. C’est à cette jetée que d’innombrables navires, de toutes les parties du monde, viennent charger et décharger leur marchandise ; c’est aussi là le terme extrême de toutes les lignes de chemins de fer de l’ouest ; après, c’est