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Laurent, qui, dans deux ans, aura son havre de refuge où les grands vapeurs transatlantiques arrêteront en passant, et qui attirera tout le commerce de l’immense région de la Matapédia, un des greniers agricoles de notre pays.

C’est la première année qu’un vapeur vient toucher à Kamouraska, et cela est dû à l’initiative de la compagnie des Remorqueurs. Auparavant, il fallait s’y rendre en chemin de fer et faire encore cinq milles en voiture, de la station au bord du fleuve où se trouve le village. Voilà pourquoi Kamouraska, malgré une supériorité incontestable sur Cacouna et sur la Rivière-du-Loup, était tenu cependant dans un oubli relatif et n’attirait guère que les mêmes familles légèrement augmentées tous les ans. Mais aujourd’hui voilà en un clin-d’œil un changement inespéré.

Si vous voulez vous promener dans de très-beaux yachts, dans des chaloupes qui défient tous les ouragans ; si vous voulez habiter, ne serait-ce qu’une quinzaine, le plus animé et le plus gai village de toute la rive sud, si vous voulez faire de jolies petites excursions à des îles qui ne sont qu’à un mille de distance, venez à Kamouraska.

Ici, respirons, roulons-nous sur l’herbe, attrapons les mouches, plongeons-nous dans la marée montante, couvrons-nous de varech. Parfums des bois, âcres senteurs du fleuve, arrivez en foule sur nos tempes humides et dans nos narines desséchées ; prairies de trèfle et de foin, champs d’avoine et d’orge, épanouissez-vous sous nos yeux, envoyez-nous à profusion de ces bouf-