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CHRONIQUES

sur lesquels 1,500 ont émigré ce printemps, outre qu’il en part encore, de quinzaine en quinzaine, quelques centaines de plus. La Landwehr de ce district a perdu la moitié de ses hommes ; mais ce n’est pas tout. Avec les hommes émigrent les capitaux. Vous qui êtes friand de statistiques, mon cher directeur, et qui en remplissez sans remords des colonnes entières de votre journal, vous apprendrez avec délice que la statistique a démontré que, depuis cinquante ans, les émigrés allemands ont emporté une somme à peu près égale au chiffre de la dette de la France envers l’Allemagne.

Cette émigration contagieuse n’aura pas lieu d’étonner, si l’on songe que la Prusse en particulier est encore un pays de moyen-âge, et que les petites gens y jouissent d’une condition sociale qui les assimile autant que faire se peut aux parias de l’Inde.

Si je vous parle de l’émigration allemande, qui peut n’avoir pas un grand intérêt pour vos lecteurs, c’est pour les consoler de l’émigration canadienne qui les touche de plus près. Au moins, les Canadiens auront désormais une raison d’émigrer : ils pourront aller contrebalancer aux États-Unis l’élément tudesque qui a déjà les proportions d’une nationalité, et qui menace de tenir bientôt l’Ouest sous son contrôle.

À propos de France et d’Allemagne, je viens de lire qu’une convention postale, récemment conclue, réduit à quatre centins le port des lettres échangées entre ces deux pays. Il devrait bien être conclu de