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CHRONIQUES

de libéraux, quand ce sont les conservateurs qui ont accompli toutes les réformes, et que les libéraux n’ont fait que se réformer eux-mêmes ? Est-ce que tout bon patriote ne doit pas désirer ardemment qu’il n’y ait plus qu’un seul parti appelé le parti conservateur-libéral-national-modéré ? Comme cela, on serait à peu près sûr de ne pas laisser de place à d’autres partis, et la nationalité canadienne serait immortelle autant qu’homogène. Mais non, l’orgueil humain veut toujours se satisfaire par des distinctions, et les nationaux n’ont eu d’autre idée, je l’affirme sur ce que j’ai de plus cher, que d’imiter l’Espagne où les partis se comptent à peu près comme suit : Radicaux, républicains-fédéraux, carlistes, conservateurs-opposants, ministériels-frontiéristes, sagastistes, amédéistes, zorillistes, des istes et des estes à faire prendre les Espagnols aux cheveux pendant trois générations. Heureusement que, chez nous, les noms seuls diffèrent et que, rien n’étant plus semblable au conservateur renfrogné des anciens temps que le libéral de nos jours, le national, qui est l’expression des deux, réussira à tout confondre.

C’est ce qu’il a déjà fait.

Il n’y a rien dans ce monde d’absolument louable ni de blâmable ; il se mêle à la plupart des choses une forte dose de pour et de contre, qui explique tant de discussions oiseuses et interminables, parce que les hommes ne regardent jamais guère qu’un seul côté des événements ou des questions. Savoir distinguer est le fait des esprits d’élite. Je vais tenter une chose