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ART. XIX. CHANGEMENTS DE TERRES EN MERS.

supposant, dit le docteur Wallis, comme tout paroît l’indiquer, que l’Angleterre communiquoit autrefois à la France par un isthme au dessous de Douvres et de Calais, les grandes mers des deux côtés battoient les côtes de cet isthme par un flux impétueux, deux fois en vingt-quatre heures ; la mer d’Allemagne, qui est entre l’Angleterre et la Hollande, frappoit cet isthme du côté de l’est, et la mer de France, du côté de l’ouest : cela suffit avec le temps pour user et détruire une langue de terre étroite, telle que nous supposons qu’étoit autrefois cet isthme. Le flux de la mer de France, agissant avec grande violence non seulement contre l’isthme, mais aussi contre les côtes de France et d’Angleterre, doit nécessairement, par le mouvement des eaux, avoir enlevé une grande quantité de sable, de terre, de vase, de tous les endroits contre lesquels la mer agissoit : mais, étant arrêtée dans son courant par cet isthme, elle ne doit pas avoir déposé, comme on pourroit le croire, des sédiments contre l’isthme ; mais elle les aura transportés dans la grande plaine qui forme actuellement le marécage de Romne, qui a quatorze milles de long sur huit de large : car quiconque a vu cette plaine ne peut pas douter qu’elle n’ait été autrefois sous les eaux de la mer, puisque, dans les hautes marées, elle seroit encore en partie inondée sans les digues de Dimchurch.

La mer d’Allemagne doit avoir agi de même contre l’isthme et contre les côtes d’Angleterre et de Flandre, et elle aura emporté les sédiments en Hollande et en Zélande, dont le terrain, qui étoit autrefois sous les eaux, s’est élevé de plus de quarante pieds. De l’autre côté sur la côte d’Angleterre, la mer d’Alle-