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LXII
ÉLOGE DE BUFFON

numération des propriétés, par les places qu’elles occupent, servent à reposer la vue, et font ressortir les autres parties de la composition. Les différences des habitudes, des appétits, des mœurs et du climat, offrent des contrastes, dont le jeu produit des effets brillants. Des épisodes heureux y répandent de la variété, et diverses moralités y mêlent, comme dans des apologues, des leçons utiles. S’il falloit prouver ce que j’avance, qu’aurois-je, messieurs, à faire de plus que de retracer des lectures qui ont été la source de vos plaisirs ? Vous n’avez point oublié avec quelle noblesse, rival de Virgile, M. de Buffon a peint le coursier fougueux, s’animant au bruit des armes, et partageant avec l’homme les fatigues de la guerre et la gloire des combats ; avec quelle vigueur il a dessiné le tigre, qui, rassasié de chair, est encore altéré de sang. Comme on est frappé de l’opposition de ce caractère féroce, avec la douceur de la brebis, avec la docilité du chameau, de la vigogne et du renne, auxquels la nature a tout donné pour leurs maîtres ; avec la patience du bœuf, qui est le soutien du ménage et la force de l’agriculture ! Qui n’a pas remarqué, parmi les oiseaux dont M. de Buffon a décrit les mœurs, le courage franc du faucon, la cruauté lâche du vautour, la sensibilité du serin, la pétulance du moineau, la familiarité du troglodyte, dont le ramage et la gaieté bravent la rigueur de nos hivers, et les douces habitudes de la colombe, qui sait aimer sans partage, et les combats innocents des fauvettes, qui sont l’emblème de l’amour léger ? Quelle variété, quelle richesse dans les couleurs avec lesquelles M. de Buffon a peint la robe du zèbre, la fourrure du léopard, la blancheur du cygne, et l’é-