qu’on ait trouvé la surface de la mer glacée au large et à une distance considérable des côtes : le seul exemple d’une mer totalement glacée est celui de la mer Noire ; elle est étroite et peu salée, et elle reçoit une très grande quantité de fleuves qui viennent des terres septentrionales, et qui y apportent des glaces : aussi elle gèle quelquefois au point que sa surface est entièrement glacée, même à une profondeur considérable ; et, si l’on en croit les historiens, elle gela, du temps de l’empereur Copronyme, de trente coudées d’épaisseur, sans compter vingt coudées de neige qu’il y avoit par dessus la glace. Ce fait me paroît exagéré : mais il est sûr qu’elle gèle presque tous les hivers, tandis que les hautes mers, qui sont de mille lieues plus près du pôle, ne gèlent pas ; ce qui ne peut venir que de la différence de la salure et du peu de glaces qu’elles reçoivent par les fleuves en comparaison de la quantité énorme de glaçons qu’ils transportent dans la mer Noire.
Ces glaces, que l’on regarde comme des barrières qui s’opposent à la navigation vers les pôles et à la découverte des terres australes, prouvent seulement qu’il y a de très grands fleuves dans le voisinage des climats où on les a rencontrées : par conséquent elles nous indiquent aussi qu’il y a de vastes continents d’où ces fleuves tirent leur origine, et on ne doit pas se décourager à la vue de ces obstacles ; car, si l’on y fait attention, l’on reconnoîtra aisément que ces glaces ne doivent être que dans certains endroits particuliers ; qu’il est presque impossible que dans le cercle entier que nous pouvons imaginer terminer les terres australes du côté de l’équateur, il y ait partout de grands