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ART. VI. GÉOGRAPHIE.

deux ans à faire ce voyage, ils entrèrent la troisième année dans le détroit de Gibraltar[1]. Cependant les anciens ne connoissoient pas la propriété qu’a l’aimant de se diriger vers les pôles du monde, quoiqu’ils connussent celle qu’il a d’attirer le fer ; ils ignoroient la cause générale du flux et du reflux de la mer ; ils n’étoient pas sûrs que l’Océan environnât le globe sans interruption : quelques uns, à la vérité, l’ont soupçonné, mais avec si peu de fondement, qu’aucun n’a osé dire, ni même conjecturer, qu’il étoit possible de faire le tour du monde. Magellan a été le premier qui l’ait fait en l’année 1519, dans l’espace de 1124 jours. François Drake a été le second en 1077, et il l’a fait en 1056 jours. Ensuite Thomas Cavendisch a fait ce grand voyage en 777 jours, dans l’année 1586. Ces fameux voyageurs ont été les premiers qui aient démontré physiquement la sphéricité et l’étendue de la circonférence de la terre ; car les anciens étoient aussi fort éloignés d’avoir une juste mesure de cette circonférence du globe, quoiqu’ils y eussent beaucoup travaillé. Les vents généraux et réglés, et l’usage qu’on en peut faire pour les voyages de long cours, leur étoient absolument inconnus : ainsi on ne doit pas être surpris du peu de progrès qu’ils ont faits dans la géographie, puisque aujourd’hui, malgré toutes les connoissances que l’on a acquises par le secours des sciences mathématiques, et par les découvertes des navigateurs, il reste encore bien des choses à trouver et de vastes contrées à découvrir. Presque toutes les terres qui sont du côté du pôle antarctique nous sont inconnues ; on sait seulement qu’il y en a, et qu’elles

  1. Voyez Hérodote, liv. iv.