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THÉORIE DE LA TERRE.

ment, au lieu de les trouver par couches ? Pourquoi les marbres, les pierres dures, les craies, les argiles, les plâtres, les marnes, etc., ne sont-ils pas dispersés ou joints par couches irrégulières ou verticales ? Pourquoi les choses pesantes ne sont-elles pas toujours au dessous des plus légères ? Il est aisé d’apercevoir que cette uniformité de la nature, cette espèce d’organisation de la terre, cette jonction des différentes matières par couches parallèles et par lits, sans égard à leur pesanteur, n’ont pu être produites que par une cause aussi puissante et aussi constante que celle de l’agitation des eaux de la mer, soit par le mouvement réglé des vents, soit par celui du flux et reflux, etc.

Ces causes agissent avec plus de force sous l’équateur que dans les autres climats, car les vents y sont plus constants et les marées plus violentes que partout ailleurs : aussi les plus grandes chaînes de montagnes sont voisines de l’équateur. Les montagnes de l’Afrique et du Pérou sont les plus hautes qu’on connoisse ; et, après avoir traversé des continents entiers, elles s’étendent encore à des distances très considérables sous les eaux de la mer Océane. Les montagnes de l’Europe et de l’Asie, qui s’étendent depuis l’Espagne jusqu’à la Chine, ne sont pas aussi élevées que celles de l’Amérique méridionale et de l’Afrique. Les montagnes du Nord ne sont, au rapport des voyageurs, que des collines, en comparaison de celles des pays méridionaux[1]. D’ailleurs le nombre des îles est fort

  1. Lorsque j’ai composé, en 1744, ce Traité de la Théorie de la terre, je n’étois pas aussi instruit que je le suis actuellement, et l’on n’avoit pas fait les observations par lesquelles on a reconnu que les sommets des plus hautes montagnes sont composés de granite et de rocs