tions dans un petit nombre d’années. En effet, il paroît certain que la terre, actuellement sèche et habitée, a été autrefois sous les eaux de la mer, et que ces eaux étoient supérieures aux sommets des plus hautes montagnes, puisqu’on trouve sur ces montagnes et jusque sur leurs sommets des productions marines et des coquilles[1] qui, comparées avec les coquillages vi-
- ↑ Ceci exige une explication, et demande même quelques restrictions. Il est certain et reconnu par mille et mille observations, qu’il se trouve des coquilles et d’autres productions de la mer sur toute la surface de la terre actuellement habitée, et même sur les montagnes, à une très grande hauteur. J’ai avancé, d’après l’autorité de Woodward, qui, le premier, a recueilli ces observations, qu’on trouvoit aussi des coquilles jusque sur les sommets des plus hautes montagnes ; d’autant que j’étois assuré par moi-même et par d’autres observations assez récentes, qu’il y en a dans les Pyrénées et les Alpes, à 900, 1000, 1200, et 1500 toises de hauteur au dessus du niveau de la mer ; qu’il s’en trouve de même dans les montagnes de l’Asie, et qu’enfui dans les Cordilières, en Amérique, on en a nouvellement découvert un banc à plus de 2000 toises au dessus du niveau de la mer*.
On ne peut donc pas douter que, dans toutes les différentes parties du monde, et jusqu’à la hauteur de 1500 ou 2000 toises au dessus du niveau des mers actuelles, la surface du globe n’ait été couverte des eaux, et pendant un temps assez long pour y produire ces coquillages et les laisser multiplier ; car leur quantité est si considérable, que leurs débris forment des bancs de plusieurs lieues d’étendue, souvent de plusieurs toises d’épaisseur sur une largeur indéfinie ; en sorte qu’ils com-
* M. Le Gentil, de l’Académie des Sciences, m’a communiqué par écrit, le 4 décembre 1771, le fait suivant : « Don Antonio de Ulloa, dit-il, me chargea, en passant par Cadix, de remettre de sa part à l’Académie deux coquilles pétrifiées, qu’il tira l’année 1761 de la montagne où est le vif-argent, dans le gouvernement de Guanca-Velica au Pérou, dont la latitude méridionale est de 13 à 14 degrés. À l’endroit où ces coquilles ont été tirées, le mercure se soutient à 17 pouces 1 ligne 1 quart ; ce qui répond à 2222 toises 1 tiers de hauteur au dessus du niveau de la mer.
» Au plus haut de la montagne, qui n’est pas à beaucoup près la plus élevée de ce canton, le mercure se soutient à 16 pouces 6 lignes ; ce qui répond à 2337 toises 2 tiers.
» À la ville de Guanca-Velica, le mercure se soutient à 16 pouces 1 ligne et demie, qui répondent à 1949 toises.
» Don Antonio de Ulloa m’a dit qu’il a détaché ces coquilles d’un banc fort épais, dont il ignore l’étendue, et qu’il travailloit actuellement à un mémoire relatif à ces observations : ces coquilles sont du genre des peignes ou des grandes pélerines. »