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THÉORIE DE LA TERRE.

nous manque, le poids réel de la matière nous étant inconnu : en sorte que l’intérieur de la terre pourroit être ou vide ou rempli d’une matière mille fois plus pesante que l’or, et nous n’avons aucun moyen de le reconnoître ; à peine pouvons-nous former sur cela quelques[1] conjectures raisonnables[2].

  1. Voyez les Preuves, art. I.
  2. Lorsque j’ai écrit ce Traité de la Théorie de la terre, en 1744, je n’étois pas instruit de tous les faits par lesquels on peut reconnoître que la densité du globe terrestre, prise généralement, est moyenne entre les densités du fer, des marbres, des grès, de la pierre, et du verre, telle que je l’ai déterminée dans mon premier Mémoire : je n’avois pas fait alors toutes les expériences qui m’ont conduit à ce résultat ; il me manquoit aussi beaucoup d’observations que j’ai recueillies dans ce long espace de temps : ces expériences toutes faites dans la même vue, et ces observations, nouvelles pour la plupart, ont étendu mes premières idées, et m’en ont fait naître d’autres accessoires et même plus élevées ; en sorte que ces conjectures raisonnables que je soupçonnois dès lors qu’on pouvoit former, me paroissent être devenues des inductions très plausibles, desquelles il résulte que le globe de la terre est principalement composé, depuis la surface jusqu’au centre, d’une matière vitreuse un peu plus dense que le verre pur ; la lune, d’une matière aussi dense que la pierre calcaire ; Mars, d’une matière à peu près aussi dense que celle du marbre ; Vénus, d’une matière un peu plus dense que l’émerit ; Mercure, d’une matière un peu plus dense que l’étain ; Jupiter, d’une matière moins dense que la craie ; et Saturne, d’une matière presque aussi légère que la pierre ponce ; et enfin que les satellites de ces deux grosses planètes sont composés d’une matière encore plus légère que leur planète principale.

    Il est certain que le centre de gravité du globe, ou plutôt du sphéroïde terrestre, coïncide avec son centre de grandeur, et que l’axe sur lequel il tourne passe par ces mêmes centres, c’est-à-dire par le milieu du sphéroïde, et que par conséquent il est de même densité dans toutes ses parties correspondantes : s’il en étoit autrement, et que le centre de grandeur ne coïncidât pas avec le centre de gravité, l’axe de rotation se trouveroit alors plus d’un côté que de l’autre ; et, dans les différents hémisphères de la terre, la durée de la révolution paroîtroit inégale. Or, cette révolution est parfaitement la même pour tous les