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DISCOURS ACADÉMIQUES.

s’entendre interroger pour la première fois ; avoir plus fait, en un mot, par le seul motif de la gloire des lettres que l’on ne lit jamais par la soif de l’or : voilà ce que connoît de vous l’Europe, et ce que dira la postérité.

Mais n’anticipons ni sur les espaces, ni sur les temps ; vous savez que le siècle où l’on vit est sourd, que la voix du compatriote est foible : laissons donc à nos neveux le soin de répéter ce que dit de vous l’étranger, et bornez aujourd’hui votre gloire à celle d’être assis parmi nous.

La mort met cent ans de distance entre un jour et l’autre : louons de concert le prélat auquel vous succédez[1] ; sa mémoire est digne de nos éloges, sa personne digne de nos regrets. Avec de grands talents pour les négociations, il avoit la volonté de bien servir l’État ; volonté dominante dans M. de Vauréal, et qui, dans tant d’autres, n’est que subordonnée à l’intérêt personnel. Il joignoit à une grande connoissance du monde le dédain de l’intrigue ; au désir de la gloire, l’amour de la paix, qu’il a maintenue dans son diocèse, même dans les temps les plus orageux. Nous lui connoissions cette éloquence naturelle, cette force de discours, cette heureuse confiance, qui souvent sont nécessaires pour ébranler, pour émouvoir, et en même temps cette facilité à revenir sur soi-même, cette espèce de bonne foi si séante, qui persuade encore mieux, et qui seule achève de convaincre. Il laissoit paroître ses talents et cachoit ses vertus ; son zèle charitable s’étendoit en secret à tous les indigents : riche par son

  1. M. de La Condamine succéda, à l’Académie Françoise, à M. de Vauréal, évêque de Rennes.