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L’esprit quelque actif, quelque étendu qu’il soit, peut aller de pair et suivre la même marche, sans se perdre lui-même ou dans l’immensité de l’espace, ou dans les ténèbres du temps, ou dans le nombre infini de la combinaison des êtres. Que l’homme dirige la marche de son esprit sur un objet quelconque : s’il voit juste, il prend la ligne droite, parcourt le moins d’espace et emploie le moins de temps possible pour atteindre à son but ; combien ne lui faut-il pas déjà de réflexions et de combinaisons pour ne pas entrer dans les lignes obliques, pour éviter les fausses routes, les culs-de-sacs, les chemins creux qui tous se présentent les premiers ; et en si grand nombre que le choix du vrai sentier suppose la plus grande justesse de discernement ? cela cependant est possible, c’est-à-dire n’est pas au-dessus des forces d’un bon esprit, il peut marcher droit sur sa ligne et sans s’écarter ; voilà sa manière d’aller la plus sure et la plus ferme : mais il va sur une ligne pour arriver à un point ; et s’il veut saisir un autre point, il ne peut l’atteindre