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Manière de traiter

quatorzième siècle, et actuellement encore le grec corrompu par les idiomes étrangers ne diffère pas autant du grec ancien, que l’italien diffère du latin. Cette langue, qu’on doit regarder comme la plus parfaite et la plus abondante de toutes, était dès le temps d’Homère portée à un grand point de perfection, ce qui suppose nécessairement une ancienneté considérable avant le siècle même de ce grand Poète ; car l’on pourrait estimer l’ancienneté ou la nouveauté d’une langue par la quantité plus ou moins grande des mots, et la variété plus ou moins nuancée des constructions : or nous avons dans cette langue les noms d’une très-grande quantité de choses qui n’ont aucun nom en latin ou en français, les animaux les plus rares, certaines espèces d’oiseaux ou de poissons, ou de minéraux qu’on ne rencontre que très-difficilement, très-rarement, ont des noms et des noms constants dans cette langue ; preuve évidente que ces objets de l’Histoire Naturelle étaient connus, et que les Grecs non seulement les connaissement, mais même qu’ils en avoient une idée précise, qu’ils ne pouvaient avoir acquise que par une étude de ces mêmes objets, étude qui suppose nécessairement des observations et des remarques : ils ont même des noms pour les variétés, et ce que nous ne pouvons représenter que par une phrase, se nomme dans cette langue par un seul substantif. Cette abondance de mots, cette richesse d’expressions nettes et précises ne supposent-elles pas la même abondance d’idées et de connaissances ?