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LE REMIZ. 631

comme ceux de la Lithuanie, de la Volhinie, de la Pologne et de l’Alle- magne ; les gens simples ont pour eux une vénération superstitieuse ; chaque cabane a un de ces nids suspendu près de la porte : les propriétaires le re- gardent comme un véritable paratonnerre et le petit architecte qui le con- struit comme un oiseau sacré. On serait tenté de faire un reproche à la nature de ce qu’elle n’est point assez avare de merveilles, puisque chaque merveille est une source de nouvelles erreurs.

Ces mésanges se trouvent aussi dans la Bohême, la Silésie, l’Ukraine, la Russie, la Sibérie, partout en un mot où croissent les plantes qui fournissent cette matière cotonneuse dont elles se servent pour construire leur nid (a) ; mais elles sont rares en Sibérie, selon M. Gmelin (b), et elles ne doivent pas non plus être fort communes aux environs de Bologne, puisque, comme nous l’avons dit plus haut, Aldrovande ne les connaissait pas ; cependant, M. Daniel Titius regarde l’Italie comme le vrai pays de leur origine (c), d’où elles ont passé par l’État de Venise, la Corinthie et l’Autriche dans le royaume de Bohême, la Hongrie, la Pologne et les contrées encore plus septentrionales. Partout, ou presque partout elles se tiennent dans les ter- rains aquatiques, et savent fort bien se cacher parmi les joncs et les feuil- lages des arbres qui croissent dans ces sortes de terrains. On assure qu’elles ne changent point de climat aux approches de l’hiver (d). Cela est facile à comprendre pour les pays tempérés où les insectes paraissent toute l’année ; mais dans les pays plus au nord, je croirais que les remiz changent au moins de position pendant les grands froids, comme font les autres mé- sanges, et qu’ils se rapprochent alors des lieux habités. M. Kramer nous apprend, en effet, qu’on en voit beaucoup plus l’hiver qu’en toute autre saison aux environs de la ville de Pruck, située sur les confins de l’Autriche et de la Hongrie, et qu’ils se tiennent toujours de préférence parmi les joncs et les roseaux.

On dit qu’ils ont un ramage ; mais ce ramage n’est pas bien connu, et cependant on a élevé pendant quelques années de jeunes remiz pris dans le nid, leur donnant des œufs de fourmi pour toute nourriture (e). Il faut donc qu’ils ne chantent pas dans la cage.

Le plumage de cet oiseau est fort vulgaire ; il a le sommet de la tête

(a) Daniel Titius remarque qu’en effet il y a beaucoup de marécages et d’arbres ou plantes aquatiques, telles que saules, aunes, peupliers, jacées, asters, hieracium, juncago, etc., dans la Volhinie, la Polésie, la Lithuanie et autres cantons de la Pologne, que les remiz semblent aimer de préférence.

(b) Voyage en Sibérie, t. II, p. 203. Le conseiller J.-Ph. de Strahlenberg avait observé ces oiseaux en Sibérie avant M. Gmelin, selon Daniel Titius.

(c) C’est de là que leur sont venus les noms de romisch, d’acanthides Romanse, d’oiseaux romains.

(d) Cajetan Monti et Daniel Titius.

(e) Daniel Titius, pages 24 et 44. Il dit ailleurs qu’ils chantent mieux que la mésange à longue queue, laquelle chante fort bien, suivant Belon.