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630 ŒUVRES COMPLÈTES DE BUFFON.

et ce qui semble prouver que ces intentions ne sont pas ici prêtées gratuite- ment à ces oiseaux, c’est qu’ils sont rusés de leur naturel, et si rusés que, suivant MM. Monti et Titius, l’on n’en prend jamais dans les pièges (a), de même qu’on l’a remarqué des carouges, des cassiques du Nouveau Monde, des gros-becs d’Abyssinie et autres oiseaux qui suspendent aussi leurs nids au bout d’une branche. Celui du remiz ressemble tantôt à un sac, tantôt à une bourse fermée, tantôt à une cornemuse aplatie, etc. (b) ; il a son entrée dans le flanc, presque toujours tournée du côté de l’eau, et située tantôt plus haut, tantôt plus bas ; c’est une petite ouverture à peu près ronde, d’un pouce et demi de diamètre et au-dessous, dont le contour se relève extérieurement en un rebord plus ou moins saillant (c), et quelquefois elle est sans aucun rebord. La femelle n’y pond que quatre ou cinq œufs, ce qui déroge notablement à la fécondité ordinaire des mésanges, dont les remiz ont d’ailleurs le port, le bec, le cri et les principaux attributs. Ces œufs sont blancs comme la neige, la coque en est extrêmement mince ; aussi sont-ils presque transparents. Les remiz font ordinairement deux pontes chaque année : la première en avril ou en mai et la seconde au mois d’août ; il est plus que douteux qu’ils en fassent une troisième.

On voit des nids de remiz dans les marais des environs de Bologne, dans ceux de la Toscane, sur le lac Trazimène, et ils sont faits précisément

(a) On les surprend quelquefois dans le nid, ajoute Titius, au coucher du soleil, ou lorsque le temps est nébuleux et chargé de brouillards.

(b) Cajetan Monti en a fait dessiner un, et Daniel Titius deux : ces trois nids diffèrent non seulement entre eux, mais de celui qu’a fait dessiner Bonanni, et pour la grandeur et pour la forme. Le plus grand de tous (Titius, pl. 2) avait sept pouces de longueur et quatre et demi de largeur ; il était suspendu à la fourche d’une petite branche avec du chanvre et du lin ; le plus petit (planche i) était long de cinq pouces et demi, large de même à sa partie supérieure, et se terminait en une pointe obtuse : c’est, selon Titius, la forme la plus ordi- naire ; celui de Monti était pointu en haut et en bas. Titius soupçonne que les remiz ne font qu’ébaucher leurs nids à la première ponte, et qu’alors les parois en sont minces et le tissu tout à fait lâche, mais qu’à chaque nouvelle ponte ils les perfectionnent et les fortifient, et qu’en les défaisant, on reconnaît ces couches additionnelles toujours plus fermes en dehors, plus mollettes en dedans ; et de là on déduit aisément les différences de forme et de grandeur qu’on observe entre ces nids. On a trouvé sur la fin de décembre 1691, près de Breslau, une femelle tarin dans un de ces mêmes nids, avec un petit éclos et trois œufs qui ne l’étaient pas encore : cela prouve que les nids des remiz subsistent d’une année à l’autre. Titius ajoute qu’on ne doit pas être surpris de voir un tarin couvant l’hiver, puisqu’on sait que les becs- croisés font de même.

(c) Aldrovande a donné la figure de ce nid, qu’il a cru être celui de la mésange à longue queue, quoiqu’il sût très bien que l’oiseau qui l’avait fait s’appelait pendulino. Voyez son Ornithologie, tome II, page 718 ; on y voit deux de ces nids accolés ensemble : cela rappelle ce que dit Rzaczynski de ces nids de remiz à double entrée que l’on trouve dans la Pokutie, sur les rives de la Bystrikz. Un auteur anonyme, dont le mémoire est dans le Journal de Physique, août 1776, page 129, va plus loin qu’Aldrovande, et, après avoir comparé le remiz et la mésange à longue queue, trouve beaucoup d’analogie entre ces deux oiseaux. Cepen- dant, en suivant exactement sa méthode de comparaison, il eût trouvé que le remiz a le bec et les pieds plus longs à proportion, la queue plus courte, l’envergure aussi, et le plumage différent.