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LES MÉSANGES. 607

4° Il est difficile de supposer que Pline n’eût jamais entendu parler du remiz et de la penduline, qui suspendent leur nid, puisque l’un des deux, au moins, nichait en Italie, comme nous le verrons dans la suite ; et il n’est pas moins difficile de supposer que, connaissant ce nid singulier, il n’en ait point parlé dans son Histoire naturelle. Or le passage ci-dessus est le seul de son Histoire naturelle qui puisse s’y appliquer : donc, ce passage ne peut s’entendre que des mésanges, considérées comme étant de la famille des pics.

De plus, cette branche de la famille des pics avait la dénomination par- ticulière de parrœ ; car dans le genre des parrœ, dit Pline, il y en a qui construisent leur nid en boule, et fermé avec tant de soin, qu’à peine on en peut découvrir l’entrée (a) : ce qui convient au troglodyte, oiseau qu’on a confondu quelquefois avec le roitelet et les mésanges, et il y en a une autre espèce qui le fait de même, en y employant le chanvre ou le lin, ce qui convient à la mésange à longue queue. Puis donc que ce nom de parrœ était le nom d’un genre qui embrassait plusieurs espèces, et que ce qui est connu de plusieurs de ces espèces convient à nos mésanges, il s’ensuit que ce genre ne peut être que celui des mésanges ; et cela est d’autant plus vraisemblable, que le nom d’argatilis, donné par Pline à l’une de ces espèces, a tant de rapport avec le nom grec aigithalos donné par Aristote aux mésanges, qu’on ne peut s’empêcher de le regarder comme le même mot, un peu défiguré par les copistes : d’autant plus que Pline ne parle point ailleurs de l’aigithalos, quoiqu’il connût très bien les ouvrages d’Aristote, et quoiqu’il les eût consultés expressément en composant son xe livre (b), qui roule sur les oiseaux. Ajoutez à cela que le nom d’argatilis n’a été appliqué par les auteurs à aucun oiseau, que je sache, autre que celui dont il est ici question, et qui, par toutes les raisons ci-dessus, semble ne pouvoir être qu’une mésange.

Quelques-uns ont confondu les mésanges avec les guêpiers, parce que, comme les guêpiers, elles sont apivores, c’est-à-dire qu’elles mangent les abeilles : on les a confondues encore avec les tette-chèvres, à cause de la ressemblance des noms grecs œgithalos, œgothêlas ; mais Gessner soup- çonne à ces deux noms si ressemblants une étymologie toute différente : d’ailleurs les mésanges n’ont jamais été ni pu être accusées de teter les chèvres.

Tous les oiseaux de cette famille sont faibles en apparence, parce qu’ils sont très petits ; mais ils sont en même temps vifs, agissants et courageux : on les voit sans cesse en mouvement ; sans cesse ils voltigent d’arbre en arbre, ils sautent de branche en branche, ils grimpent sur l’écorce, ils gra- vissent contre les murailles ; ils s’accrochent, se suspendent de toutes les

(a) « In genere parrarum est, cui nidus ex musco arido ita absoluta perficitur pila, ut inve- niri non possit aditus. » Ibidem. — Voyez Belon, p. 343.

(b) Voyez Pline, lib. i, p. 31, Nat. Hist. Elzevir, 12°, 1635.