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600 ŒUVRES COMPLÈTES DE BUFFON.

des filets ordinaires ; qu’il s’échappe facilement de toutes les cages, et que lorsqu’on le lâche dans une chambre que l’on croit bien fermée, il disparaît au bout d’un certain temps et se fond en quelque sorte sans qu’on en puisse trouver la moindre trace : il ne faut, pour le laisser passer, qu’une issue presque invisible. Lorsqu’il vient dans nos jardins, il se glisse subtilement dans les charmilles, et comment ne le perdrait-on pas bientôt de vue ? la plus petite feuille suffit pour le cacher : si on veut se donner le plaisir de le tirer, le plomb le plus menu serait trop fort, on ne doit y employer que du sable très fin, surtout si on se propose d’avoir sa dépouille bien conservée. Lorsqu’on est parvenu à le prendre, soit aux gluaux, soit avec le trébuchet des mésanges, ou bien avec un filet assez fin, on craint de trop presser dans ses doigts un oiseau si délicat ; mais comme il n’est pas moins vif, il est déjà loin qu’on croit le tenir encore ; son cri aigu et perçant est celui de la sau- terelle, qu’il ne surpasse pas de beaucoup en grosseur (a). Aristote dit qu’il chante agréablement, mais il y a toute apparence que ceux qui lui avaient fourni ce fait avaient confondu notre roitelet avec le troglodyte, d’autant plus que, de son aveu, il y avait dès lors confusion de noms entre ces deux espèces. La femelle pond six ou sept œufs, qui ne sont guère plus gros que des pois, dans un petit nid fait en boule creuse, tissu solidement de mousse et de toile d’araignée, garni en dedans du duvet le plus doux, et dont l’ou- verture est dans le flanc ; elle l’établit le plus souvent dans les forêts, et quelquefois dans les ifs et les charmilles de nos jardins, ou sur des pins à portée de nos maisons (b).

Les plus petits insectes sont la nourriture ordinaire de ces très petits oiseaux : l’été ils les attrapent lestement en volant, l’hiver ils les cherchent dans leurs retraites, où ils sont engourdis, demi-morts et quelquefois morts tout à fait ; ils s’accommodent aussi de leurs larves et de toutes sortes de vermisseaux ; ils sont si habiles à trouver et à saisir cette proie, et ils en sont si friands, qu’ils s’en gorgent quelquefois jusqu’à étouffer. Ils mangent dans l’été de petites baies, de petites graines, telles que celles du fenouil ; enfin on les voit aussi fouiller le terreau qui se trouve dans les vieux saules, et d’où ils savent apparemment tirer quelque parcelle de nourriture. Je n’ai jamais trouvé de petites pierres dans leur gésier.

Les roitelets se plaisent sur les chênes, les ormes, les pins élevés, les sapins, les genévriers, etc. On les voit en Silésie l’été comme l’hiver, et toujours dans les bois, dit Schwenckfeld ; en Angleterre, dans les bois qui couvrent les montagnes ; en Bavière, en Autriche, ils viennent l’hiver aux environs des

(a) Ce chant n’est pas fort harmonieux, si Gessner l’a bien entendu et bien rendu ; car il l’exprime ainsi : zul, zil, zalp.

(b) Le lord Trevor a trouvé un de ces nids dans son jardin sur un if. Le docteur Derham a remarqué que ces mêmes oiseaux venaient nicher tous les ans sur des sapins, devant sa maison, à Upminster, province d’Essex. Willughby.